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SIPM-CNT

Multimédia Press à la pointe de la précarité

info parue sur une liste de pigistes en décembre dernier

lundi 12 juillet 2004

Multimédia Presse modifie unilatéralement le contrat de ses pigistes. CDD d’usage, Agessa, c’est la fête... Commentaires du SIPM.

Dans le genre pervers, voici une offensive patronale inédite, captée sur une liste de discussion de pigistes en décembre 2003. C’est une lettre adressée aux pigistes de Multimedia Press, groupe spécialisé dans l’informatique, la musique et le tuning.


"Bonjour à tous,

Une nouvelle année arrive et, avec elle, des nouveaux tarifs pour vos piges. Pas de panique, vous y serez gagnants.

Désormais, vous percevrez votre paie en deux parties : la moitié à la fin de mois de remise de l’article - ce sera la partie salaire, avec les mêmes modalités qu’aujourd’hui - ; l’autre moitié en droits d’auteur (AGESSA), à la fin du mois de parution de votre papier.

Avec cette nouvelle formule, vous nous cédez les droits d’édition de votre article, non plus pour la parution dans un magazine mais pour une quantité d’exemplaires vendus (cf. plus bas).

Pour chaque commande, vous recevrez un contrat de travail à nous renvoyer signé (les envois par lots seront bien entendu tout à fait tolérés). Vos démarches auprès des ASSEDIC seront amplement facilitées, le système traditionnel des piges ne rentrant pas dans leurs cases... Seule la partie salaire sera prise en compte par eux, celle qui vous sera versée le "bon" mois (au sens des Assedic, c’est à dire le mois où vous avez réellement travaillé).

Venons en à ce qui vous intéresse sans doute le plus : alors, combien ? Le tarif brut du feuillet passe de 38 à 44 euros, soit une augmentation de 16%. Ce tarif est réparti en : 22 euros de salaire et 22 euros de droits d’auteur. Mais, plus intéressant pour vous, votre net passera de 30,40 euros à 37,40 euros (+23 %). Soyons francs, l’augmentation du net est en partie liée à des charges moins importante sur la partie AGESSA. En contrepartie, vos cotisations (ASSEDIC, retraite, etc...) sont donc légèrement réduites.

Le payement initial de 44 Euros couvre 120 000 exemplaires vendus, chaque tranche entamée de 60000 exemplaires supplémentaires entraîne une rémunération (AGESSA) de 22 euros bruts.

Ce nouveau tarif entrera en vigueur le 15 janvier 2004. Si vous avez des questions, n’hésitez pas à me les envoyer par mail. Sur ces bonnes nouvelles, toute l’équipe vous souhaite un très beau Noël et, par avance, une excellente année 2004.

A.B., Multimédia Press "


Passons sur le cynisme des "bonnes nouvelles" et de l’arrangement pour les démarches Assedic. On est dans une période gonflée où les patrons se permettent tout, y compris de se payer a tronche de leurs salariés.

En effet, le « problème » des Assedic c’est avant tout le problème de l’employeur qui ne fait pas de contrats de travail et se retrouve avec des salariés qui peuvent faire valoir leur droit à un CDI. Ici, les contrats dont il est question sont probablement des contrats d’usage avec lesquels le patron a tout bon et le salarié tout faux (voir l’article concernant l’utilisation du contrat d’usage pour les ouvriers du livre, qui commence à être également utilisé pour les pigistes)

Quant à la « franchise » : la « légère » réduction des cotisations est en fait une suppression complète de toute cotisation dans le cadre des Agessa : l’indemnité chômage ne sera plus calculée que sur la partie « salaire », et les retraites... Sans oublier que cela est parfaitement illégal et que le pigiste ne pourra même pas faire valoir ses maigres droits sur la partie Agessa. Autre grosse connerie, les journalistes, qui dépendent de l’annexe au régime d’assurance chômage ne doivent pas déclarer leurs rémunérations pour le mois correspondant au travail effectué mais pour le mois où ils l’ont effectivement perçue.

De surcroît, cela marque l’intéressante invention d’un genre de prime d’intéressement comme mode de rémunération principal (selon les ventes du numéro), incontrôlable pour les salariés ( sauf à aller chercher des mois pus tard, les chiffres OJD et encore, ces canards s’y soumettent-ils ?). Ce système introduit l’idée perverse que le pigiste est coresponsable des bonnes ventes du media où il est employé, sur lequel il n’a par ailleurs aucun contrôle !

Le bénéfice, c’est donc tout pour la boîte :
 diminution conséquente des cotisations sociales ;
 CDD d’usage qui limite les possibilités de demande de requalification en CDI de la part des pigistes ;
 une partie du salaire payée plus tard ce qui assouplit la trésorerie de la boîte.

Joyeux Noël !

Mais n’oublions pas : il s’agit bien d’une modification substantielle du contrat de travail, et donc les Prud’hommes sont compétents pour traiter le dossier.