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SIPM-CNT

Presse quotidienne : le grand bond en arrière

jeudi 18 décembre 2003

La logique de financiarisation de la presse est un processus aujourd’hui en voie d’achèvement, avec les ouvertures massives annoncées chez Libération (49% envisagés d’ici quelques années par Rothschild) et Le Monde (qui se vend à Lagardère). Cette logique marque la fin d’un cycle. N’oublions pas qu’au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, figurait à l’ordre du jour la mise en place de remparts contre cette même financiarisation de la presse qui avait entraîné, pendant le pétainisme et l’occupation nazie, une collaboration totale. Empêcher que la presse ne puisse à nouveau être asservie par les intérêts financiers, afin qu’elle puisse accomplir sa mission en toute indépendance.
Aujourd’hui, ne demeurent que des groupes tentaculaires distillant un poison unique, et les quelques voix marginales ne semblent avoir pour ambition que de les concurrencer sur leur terrain, en s’abaissant à la médiocrité de leur contenu et en envisageant leur propre intégration à cette logique financière (audiovisuel public, Le Monde, Libération...)

Parallèlement, bien entendu, les acquis des salariés sont systématiquement mis en cause. La priorité a été de détruire les ouvriers du Livre et leurs conquêtes historiques. Le patronat est en passe d’atteindre son but grâce à un doublé inespéré, puisque c’est aussi le statut de journaliste qui est mis en cause dans l’accord-cadre signé le 30 novembre dernier.
 Ses meilleurs alliés auront été certaines directions syndicales corrompues et bureaucratisées, privilégiant leur propre survie à toute autre perspective, au détriment de l’intérêt de l’ensemble des travailleurs.
 Le corporatisme aura également été déterminant dans la victoire du patronat, empêchant que puisse se constituer un front uni, encourageant les luttes fratricides alors même que l’intérêt commun était en péril, paralysant les syndicats qui avaient conservé des valeurs de solidarité.
Pour les ouvriers, ils paient également l’incapacité, à l’époque de l’informatisation, à s’intégrer dans les nouveaux processus de fabrication, l’illusion que tout pouvait demeurer comme avant.
 Quoi qu’il en soit, aujourd’hui, l’enjeu pour le patronat est clair : faire table rase du passé, des statuts protecteurs et des conventions collectives.

Mais il n’est jamais trop tard pour réagir, et même si tout ne pourra être sauvé, d’autres conquêtes sont possibles, et pourquoi pas sur des bases plus saines que les anciennes.
 Avant tout, il faut briser le corporatisme destructeur : être fier de son métier, vouloir le faire bien, cela ne peut être au détriment des autres catégories : employés, journalistes, ouvriers, nous sommes tous les maillons essentiels aux journaux que nous produisons collectivement. Créer dans la presse un véritable syndicalisme d’industrie qui soit une force collective face à un patronat de plus en plus désincarné, arrogant, exigeant.
 Ensuite, il faut renouer avec des pratiques syndicales démocratiques, garder le contrôle collectif de l’outil, afin qu’il soit réellement au service des travailleurs, et non une avant-garde autoproclamée décidant à leur place et privilégiant ses intérêts institutionnels.
 Enfin, il faut intégrer dans nos pratiques syndicales l’objectif qui est la réappropriation de l’information, le refus de sa marchandisation, le refus de la voir servir les intérêts de ceux qui nous exploitent : les professionnels doivent défendre la qualité de ce bien collectif, sa dimension de service public.

Les documents disponibles sur le site du syndicat :
 Ça presse n° 4 Presse quotidienne
 Lire l’accord
 Lire également la motion des SR de L’Huma
et celle de SR de la presse quotidienne nationale
 Le Monde : Adieu Plenel, on t’aimait pas, tu sais
 Annonce aux salariés de l’ouverture du capital du groupe par Colombani
 Le SIPM contre l’ouverture de Libé à Rothschild